Le premier plan-masse fait apparaître 129 maisons (1924), il s’enrichit en 1925 d’un projet d’entrée monumentale sous la forme d’un immeuble portique de six étages pour 8 logements empilés en damier ce qui porterait le nombre maximum à 136 logements. Mais en même temps, il supprime les logements 48, 59, 60, 130, ce qui ramène le projet le plus complet à 132 logements. La 48 reviendra sur le projet final, mais en échange, la 45 sera supprimée.
La demande d’augmenter la surface des parcelles, et de multiples difficultés tout au long du chantier ne permettront de construire que cinquante et une maisons.
Ces difficultés seront de tous ordres :
Les obstacles techniques : Les entreprises locales apparaissent rapidement incompétentes. L’obstination de Henry Frugès à conserver comme contremaître Monsieur Poncet, employé de son usine, jugé totalement incapable par LC, créera de nombreuses difficultés : erreurs récurrentes sur l’implantation des maisons, initiatives personnelles dans la fabrication des planchers des quinconces (qui devront être consolidés par l’ajout d’un poteau et d’une poutre métallique), mauvaise lecture des plans et incompréhension des modes de pose des parois en paille de la marque Solomite. Ces panneaux de Solomite, attachés à un grillage extérieur, devaient être enduits de ciment à l’extérieur et de plâtre à l’intérieur par projection. Mais le canon à ciment Ingersoll-Rand acheté par H. Frugès et testé sur le lotissement de Lège, s’avère un procédé difficile à utiliser par des équipes non formées. Il devra être abandonné au profit des parpaings de ciment, voulus creux pour des raisons d’isolation par LC. A Lège, il semblerait que LC a fait essayer le canon à ciment sur divers supports, dont des nattes de roseaux ou bambou disposés en vague comme des palplanches. Des rumeurs racontent que le canon Ingersoll-rand a fini par rouiller à Lège, peut-être dans le bâtiment collectif.
Trop tardivement pour sauver le chantier, H. Frugès acceptera en avril 1925 la reprise en main par l’ingénieur de LC, Monsieur Summer, ingénieur parisien et de son équipe de maçons italiens dirigée par Jean Petruchionni. L’ingénieur André Vrinat prendra le relais et assurera la permanence jusqu’à la fin du chantier.
Les difficultés humaines : Le Corbusier par son projet, provoque la méfiance et la jalousie des entrepreneurs locaux, ainsi que celle des architectes.
Les services administratifs freinent volontairement le bon déroulement des travaux.
Pour sauver le projet, il faudra le soutient du Ministère des Travaux Publics, dont le ministre Anatole de Monzie viendra inaugurer la cité le 13 juin 1926, alors que cinq maisons seulement sont terminées sur les cinquante et une de la première tranche, la seule finalement conduite jusqu’à son terme. Trois ans après, au printemps 1929, les dossiers ne sont pas signés et depuis trois ans, le village est resté vide. La presse dans plusieurs pays écrit que Pessac est inhabitable, parce qu’i est construit sur des principes erronés. Enfin, grâce à l’intervention énergique de M. Loucheur, ministre du Travail, un enquêteur est remonté à l’origine de cette troublante aventure et a trouvé enfin les causes de la carence de l’eau. Il ne faudra pas moins qu’un aménagement de la loi Loucheur, en 1929, à propos des droits de mutation, pour que les logements trouvent tardivement acquéreurs.
Les problèmes financiers, consécutifs à tout cela aideront grandement Henry Frugès à aller vers la faillite (outre des problèmes de santé et quelques revers financiers dans son industrie).